Plaidoyer pour le maintien de l’IEF en l’état réglementaire actuel et pour la fin des atteintes illégitimes aux droits des familles instructrices

Le projet de loi « pour lutter contre les séparatismes », renommé par pur effet cosmétique « projet de loi confortant le respect des principes de la République », après son passage de justesse au Conseil d’État n’a, de fait, pas changé dans le fond s’agissant de l’interdiction de l’instruction en famille (IEF). 

« L’instruction en famille ne pourra, désormais, intervenir que de manière dérogatoire, motivée dans le respect des droits de l’enfant. » Source : www.gouvernement.fr

Contrairement aux éléments de langage servis par le Gouvernement aux médias, (qui n’ont pas creusé plus loin), l’article 21 du projet de loi veut toujours restreindre drastiquement la liberté fondamentale des parents de choisir le mode d’instruction de leurs enfants, en dénaturant au passage l’esprit et la lettre du principe de laïcité.

« L’autorisation mentionnée au premier alinéa ne peut être accordée que pour les motifs suivants, sans que puissent être invoquées les convictions politiques, philosophiques ou religieuses des personnes qui sont responsables de l’enfant : l’état de santé de l’enfant ou son handicap, la pratique d’activités sportives ou artistiques intensives, l’itinérance de la famille en France ou l’éloignement géographique d’un établissement scolaire, l’existence d’une situation propre à l’enfant, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de leur capacité à assurer l’instruction en famille dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. »

Nous sommes en France, fin 2020, et l’État s’apprête à sélectionner, parmi les opinions politiques, religieuses et philosophiques des citoyens, celles qui auront le droit de jouir de leur liberté constitutionnelle d’enseignement. Il admet aussi qu’il étudiera les handicaps et les conditions de santé selon un référentiel d’État. Et le tout, sans aucun garde-fou législatif pour éviter les éventuelles dérives idéologiques d’un Gouvernement futur, plus autoritaire.

 

1 – Le rapport complet du Conseil d’État doit être rendu public et une étude d’impact réelle doit être menée.

Afin de penser une loi juste et équitable, il faut de la transparence.

Depuis la présidence Hollande nous, citoyens, sommes habitués à ce que les organes de l’État agissent avec davantage de transparence. Par souci d’apaisement, il nous semble évident que le Gouvernement doit rendre publiques les craintes initiales du Conseil d’État au sujet de l’article 21 de la loi confortant les principes républicains au lieu de les cacher sous le tapis de la Commission spéciale de l’Assemblée, et admettre que les parents questionnent l’étude d’impact qui accompagne son projet de loi.

Cette étude ne donne aucun chiffre concret de radicalisation au sein des foyers en IEF, ni sur les comptes publics qui devront absorber, dès 2021, le versement de l’ARS aux ex-familles IEF (qui n’en bénéficiaient pas) et adapter l’accueil d’au moins 30 000 élèves supplémentaires. Par ailleurs, elle ne prend pas en compte l’impact de la loi à venir sur les enfants et les familles. Une étude bâclée, donc, qui n’a même pas pris la peine de consulter les représentants de ces familles pour établir un rapport digne et respectueux des citoyens qu’elle va priver d’une partie de ses droits. Sans cette transparence, toute décision est soumise à interprétation politique ou à la suspicion sur les motivations réelles de l’exécutif. 

Réécrire un texte en quelques heures après qu’il a été initialement retoqué par le conseil d’administration du Conseil d’État pour que ce dernier l’avalise in fine du bout des lèvres, est un indice qui devrait amener un Parlement démocrate à le remettre en question. 

Le Gouvernement et les parlementaires se doivent de légiférer sur la base de données vérifiées et probantes et non sur des présupposés qui forgent de mauvaises lois. Dans le cas contraire, l’État verserait lui-même dans l’obscurantisme qu’il prétend condamner.

2 – Conservons le régime de déclaration de l’IEF. 

Une liberté constitutionnelle ne doit pas être soumise à une « autorisation » préalable. 

Conditionner la jouissance d’une liberté constitutionnelle, la liberté d’enseignement – dont l’instruction en famille fait partie -, à l’autorisation d’un ministère n’est pas la conception que nous nous faisons de la démocratie de notre pays.

« Le principe de la liberté de l’enseignement, qui figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, implique la possibilité de créer des établissements d’enseignement, y compris hors de tout contrat conclu avec l’État, tout comme le droit pour les parents de choisir, pour leurs enfants, des méthodes éducatives alternatives à celles proposées par le système scolaire public, y compris l’instruction au sein de la famille. » (Conseil d’État, 3e – 8e chambres réunies, 19/07/2017, 406150, Inédit au recueil Lebon)

Transposé à une autre liberté, celle des journalistes par exemple, cela équivaudrait à transformer la liberté de la presse, quand elle désire informer sur les manifestations, en obligeant les journalistes à demander d’abord une autorisation au  ministre de l’Intérieur avant tout reportage. Il nous semble d’ailleurs que la corporation a réagi vertement quand monsieur Darmanin a proposé ce genre de disposition, dans le cadre du schéma national de maintien de l’ordre, le 17 septembre 2020 (chapitre 2.2)

En outre, c’est Jean-Michel Blanquer lui-même qui argumente le mieux contre l’actuel article 21. Citons ses propos du 14 février 2019 dans le cadre des débats du projet de loi pour une école de la confiance, quand madame Pau-Langevin proposait un régime d’autorisation pour l’instruction en famille, très similaire à celui proposé aujourd’hui:

« Mme George Pau-Langevin. Indiscutablement, la liberté d’instruire son enfant à domicile est accordée et, dans certains cas, elle est exercée de façon plus ou moins claire. C’est pourquoi nous souhaitons que l’on puisse examiner de plus près les raisons pour lesquelles un enfant est instruit à domicile, et dans quelles conditions. Nous proposons donc de rendre obligatoire, non pas seulement une déclaration, mais l’obtention d’une autorisation délivrée par les services de l’éducation nationale, qui vérifieraient pourquoi la famille préfère procéder à cette instruction à domicile. (…)

le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Christine Lang, rapporteure. Avis défavorable. La liberté de l’enseignement est un principe à valeur constitutionnelle. Instaurer une autorisation préalable irait à l’encontre du principe du choix de l’instruction.  

le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Jean-Michel Blanquer, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons. Nous avons déjà eu un débat semblable au moment de l’examen de la loi dite Gatel. Les arguments qui appuient nos propositions sont donc connus.

le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

Patrick Hetzel. Lundi, le ministre s’offusquait de dispositions liberticides que j’évoquais ; avec cet amendement, on monterait encore d’un cran ! S’il était adopté, liberticides, nous le serions complètement : dès lors que la liberté d’enseignement est garantie par la Constitution, il serait un peu fort d’entrer dans une logique de contrôle a priori – clairement, une logique de défiance. Il faut se garder de suivre une telle logique de défiance permanente. Pour ma part, je suis totalement hostile à une vision aussi coercitive.

  1. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 703 et 825. (Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants  52

Nombre de suffrages exprimés 50

Majorité absolue 26

Pour l’adoption 7

Contre 43

(Les amendements identiques nos 703 et 825 ne sont pas adoptés.) » 

Source : www.assemblee-nationale.fr

3 – L’État n’a pas à mettre l’autorité parentale sous tutelle.

Les parents n’ont pas à demander la permission de choisir l’instruction à donner à leur enfant, ni à prouver leurs qualités de parent.

L’article 26.3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme est clair : « Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants. » 

L’État doit fournir le service public d’une instruction de qualité pour les parents qui souhaitent lui déléguer cette responsabilité, et non l’inverse, comme le sous-entend l’actuel projet de loi dans ses conditions de dérogation :

« 4° L’existence d’une situation particulière propre à l’enfant, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de leur capacité à assurer l’instruction en famille dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. » 

L’État ne peut et ne doit pas se substituer à l’autorité parentale. Choisir pour son enfant la meilleure éducation possible est une prérogative de parent. C’est cette prérogative qui fonde la liberté d’enseignement : éviter la monoculture éducative et ses risques de dérives, en promouvant la diversité des opinions, fournir au parent l’éventail de choix qui correspond à ses convictions et au bien-être de son enfant.

Par ailleurs, le Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales précise aussi : 
« L’État, dans l’exercice des fonctions qu’il assumera dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement, respectera le droit des parents d’assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques. »  Source : www.echr.coe.int

4 – L’État prend le chemin de la dérive autoritaire. 

L’État n’a pas à s’immiscer dans les décisions privées des parents pour l’éducation de leurs enfants : politique, philosophie et religion relèvent de la sphère intime. L’État n’a pas à émettre de jugement de valeur à leur encontre, si elles ne contreviennent pas aux lois en vigueur.

L’article 14 de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) est clair : 

« les États parties respectent le droit et le devoir des parents ou, le cas échéant, des représentants légaux de l’enfant, de guider celui-ci dans l’exercice du droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, d’une manière qui corresponde au développement de ses capacités. » 

Un parent peut donc, tout à fait légitimement, choisir d’instruire son enfant en famille ou dans une école privée confessionnelle. L’État n’a pas à interférer en la matière tant que  les lois en vigueur dans le pays sont respectées par les parents.

Le Gouvernement Castex cherche dans les législations des nations européennes limitrophes une caution à sa politique d’interdiction. Il cite notamment l’Allemagne comme modèle de suppression de l’instruction en famille. L’Allemagne s’est appuyée, pour contourner toute interdiction de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, sur l’antériorité d’une décision légale allemande datée du 6 juin 1938, et relative à la scolarité obligatoire. Elle était rédigée en ces termes :

« Paragraphe 1 – Scolarité obligatoire générale 

La scolarité obligatoire s’applique dans toute l’Allemagne. Elle assure l’éducation et l’instruction de la jeunesse allemande dans l’esprit du national-socialisme. Tous les enfants et adolescents de nationalité allemande résidant de manière permanente ou habituelle sur le territoire allemand y sont soumis. 

2° La scolarité obligatoire s’effectue dans un établissement scolaire du Reich. Les exceptions sont déterminées par l’inspection académique. » – Source : Gesetz über die Schulpflicht im Deutschen Reich (Reichsschulpflichtgesetz) vom 6. Juli 1938

Est-ce vraiment le modèle que nous voulons pour affirmer le fondement des valeurs de tolérance de notre République?

5 – Être un État laïc n’implique pas de soupçonner de radicalisation, par défaut, la religion d’une partie des citoyens. 

Le principe profond de séparation de l’Église et de l’État n’exclut pas le droit, pour les citoyens, d’avoir des convictions religieuses ou philosophiques diverses. La Constitution en encadre l’exercice.  

L’article premier de la Constitution française est sans équivoque. Si la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale, elle assure aussi. 

« l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » 

Ce n’est pas parce que des idéologies politiques instrumentalisent la foi de certains croyants qu’il faut troquer les valeurs de la République humaniste pour celles de la monarchie du 18 octobre 1685.

« La laïcité garantit la liberté de conscience. De celle-ci découle la liberté de manifester ses croyances ou convictions dans les limites du respect de l’ordre public. La laïcité implique la neutralité de l’État et impose l’égalité de tous devant la loi sans distinction de religion ou conviction. » Source : www.gouvernement.fr

Dans la plus grande majorité des cas, les parents de France, quelles que soient leurs croyances ou leurs convictions, souhaitent le meilleur pour leurs enfants, et ne souhaitent pas les voir se couper du monde dans lequel ils grandissent. La République s’expérimente dans le quotidien de la vie en société, la citoyenneté s’y exerce tout autant. L’État fait société grâce aux individus. Et c’est le rôle des parents de guider les enfants pour y vivre en harmonie. 

Comment l’État peut-il se proclamer plus compétent et légitime que les parents pour éviter les influences funestes sur l’enfant ? En quoi l’obligation de fréquenter une école empêchera-t-elle les agents provocateurs, porteurs des idéologies politiques séparatistes, de trouver une autre voie, une autre voix pour les atteindre, à supposer qu’ils aient un jour exercé une influence quelconque sur certaines familles instructrices ? Sur quelle base d’efficience serait ensuite jaugée cette nouvelle compétence régalienne, puisqu’on ne sait même pas quelle est l’ampleur de la situation initiale ?

 

6 – L’enfant doit être écouté et entendu pour toute décision le concernant. 

Les motivations d’un État signataire de la CIDE, qui légifère sur l’intérêt supérieur de l’enfant sans jamais lui donner la parole, ne sont pas crédibles.

L’article 12.1 de la Convention internationale des droits de l’enfant est catégorique : 

« Les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. » 

On n’inculque pas les valeurs de la République à un enfant  en commençant par le priver d’une partie de ses droits : celle qui lui permet d’exprimer le mode d’instruction qui lui convient le mieux, qui lui permet de s’épanouir, qui le rassure le plus.

Parler à la place de l’enfant en prétendant agir pour son bien est un camouflet rétrograde.

7 – Ajouter des textes aux textes ne les rend pas plus fermes.

L’État a déjà les outils législatifs pour lutter contre les écoles de fait (clandestines), le défaut d’instruction obligatoire et toute forme d’instruction non conforme aux valeurs républicaines. 

Depuis les années 2000, l’État a pris conscience de l’existence de potentielles influences néfastes sur l’exercice de la parentalité par des puissances étrangères, des gourous divers et variés, des mouvements politiques ou religieux intégristes. 

Ces influences concernent la société française dans sa globalité, et non spécifiquement l’instruction en famille. 

S’agissant de cette dernière, le pouvoir législatif en France a largement renforcé ses moyens d’action pour lutter contre les éventuelles dérives, notamment en 1998, 2007, 2009, 2015, 2017 et 2019. 

Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation.« […] C’est pourquoi j’ai pu dire à l’Assemblée nationale et au Sénat qu’il fallait encadrer davantage, et c’est ce que nous avons fait. À l’heure actuelle, je pense qu’il faut appliquer les règles que nous avons établies dans la loi de 2019. La mise en oeuvre en débute ; nous sommes en phase ascendante, mais l’objectif de 100 % de contrôles réalisés n’a été atteint ni à cette coopération bien comprise avec les familles ; il y a donc encore des progrès concrets à faire. Mais sur le plan juridique, je crois que nous sommes parvenus à un bon équilibre. » (Audition du Sénat : CE combattre la radicalisation islamique 18 juin 2020)

L’arsenal législatif est complet et suffisant. Si le séparatisme inquiète tant, il appartient à l’État de renforcer et mieux former le personnel chargé de faire respecter les lois existantes. Pas d’ajouter encore de nouveaux alinéas au Code de l’éducation.

8 – Plus d’agents de terrain et moins de ronds de cuir.

Vérifier que l’instruction d’un enfant est conforme à ses droits à l’éducation et n’est pas soumise à l’endoctrinement doit se faire sur le terrain, par les inspecteurs d’académie et non sous les dorures d’un bureau ministériel.

Nous ne nions pas qu’il puisse exister certaines dérives éducatives, que ce soit à l’école, à sa périphérie, ou dans certaines familles. À ce jour, aucun ministère n’a pourtant pu nous donner de chiffres spécifiques. 

« C’est vrai qu’à ce stade nous avons plutôt des “évaluations” de ce phénomène qu’un véritable comptage mais c’est justement parce que nous n’avons pas jusqu’à présent les outils juridiques et autres d’ailleurs. »  Jean-Michel Blanquer, Respect des principes républicains, Commission Spéciale de l’Assemblée Nationale, jeudi 17 décembre 2020 (3h05’33)

Cependant, les enfants instruits en famille sont les apprenants les plus contrôlés de France quant à leur cadre général d’instruction : enquête de la mairie tous les deux ans et rencontre annuelle, par les familles, d’un inspecteur académique. Les contrôles de ces deux administrations ont lieu, la plupart du temps, à domicile et se passent bien dans plus de 99% des cas.

Les inspecteurs d’académie eux-mêmes, en charge de contrôler l’instruction donnée par les familles IEF, ont alerté le Gouvernement quant à « la tentation de la simplification et de l’amalgame entre instruction à domicile et radicalisation religieuse », estimant qu’« il est licite de se demander si l’interdiction de l’instruction à domicile est réellement pertinente et si elle a une chance d’être efficace dans la lutte contre la radicalisation religieuse. » Source : www.syndicat-ia.fr

Un discours enflammé donné aux Mureaux, transformé en loi bancale par des ronds de cuir au ministère, ne remplace pas l’expertise des “hussards noirs” de la République sur le terrain. Le renforcement de leurs équipes et de leur formation pour être capables de surveiller efficacement une pratique éducative en croissance mécanique (du fait de l’abaissement de l’âge légal de l’instruction obligatoire et de la situation pandémique du pays) nous semble de l’ordre de l’évidence. Il n’est pourtant pas prévu d’évolution en ce sens.

9 – L’instruction en famille n’est pas un projet « contre l’école ».

L’IEF est une décision éducative que les familles prennent toujours « dans l’intérêt supérieur » de leur enfant.

En France, « on va à l’école » a déclaré notre Président il y a peu. « L’école n’est jamais une punition », a ajouté le ministre de l’Intérieur, et le ministre de l’Éducation, quant à lui, a synthétisé ainsi : « Tout enfant va à l’école, l’école c’est bon pour les enfants. »

Rectifions. 

En France, la plupart des enfants vont à l’école et y trouvent le cadre nécessaire à leur épanouissement. L’engagement des professeurs, instituteurs, éducateurs, personnels d’accompagnement y est entier. En revanche, soulignons également que ce schéma global n’est pas adapté aux besoins de tous les enfants. Les parents sont alors amenés à faire des choix, uniquement en faveur du bien-être de leur enfant. C’est d’ailleurs la base de la parentalité. Il n’y a aucune remise en cause systématique du bien-fondé du service public qu’est l’école.

C’est aussi le fondement du principe éducatif signé par la France au travers de l’article 29 a de la Convention internationale des droits de l’enfant

« favoriser l’épanouissement de la personnalité de l’enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités. »

 

10 – L’instruction en famille est plurielle.

L’État focalise les effets de sa loi sur la capacité du parent instructeur à instruire son enfant. Or, en IEF, un certain nombre de parents font le choix de recourir à des écoles d’enseignement à distance, qualifiées.

Les enfants instruits en famille, hors CNED, sont parfois inscrits à des cours à distance qui ont pour particularité d’adapter l’éducation au rythme de chaque enfant, selon la pédagogie de professeurs formés (et souvent diplômés de l’Éducation nationale) qui dépendent d’organismes d’enseignement à distance strictement contrôlés par l’État. 

L’IEF, ce n’est pas uniquement une individualisation de la pédagogie menée par les parents. C’est aussi, très souvent, leur choix de recourir aux services d’écoles en ligne innovantes, adaptées aux enfants qui ne peuvent ou ne veulent pas se rendre dans les établissements en présentiel. Des écoles et des modèles de cours à faire pâlir de jalousie n’importe quel professeur désemparé quand survient un confinement pandémique qui le prive de la possibilité d’enseigner face à ses élèves.

L’IEF constitue donc également un terreau pédagogique de professeurs et de spécialistes de l’éducation qui ont à cœur de faire vivre cette branche de la liberté d’enseignement, aidés par des méthodologies et des supports innovants. En légiférant contre l’instruction en famille, le Gouvernement jette donc l’opprobre sur un tissu pédagogique et économique national vivace dont l’État pourrait s’inspirer en période de rebond épidémique. 

11 – On n’apprend pas n’importe quoi en IEF.

Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture est le référentiel national de toutes les formes d’instruction obligatoire et sert de base à tous les contrôles. L’IEF n’y fait pas exception.

Les inspecteurs chargés du contrôle de l’instruction se réfèrent à ce socle aussi bien pour les écoles publiques ou privées que pour l’instruction en famille. « Le socle est le cadre auquel ils se réfèrent pour confirmer que les enseignements se situent dans la perspective de l’acquisition d’une culture scolaire commune. »

Les enseignants et les parents doivent en organiser la progression et les modalités de mise en œuvre, avec pour objectif spécifique à l’instruction en famille la maîtrise complète des cycles de ce socle commun, à 16 ans. Les enfants instruits en famille ont une obligation de progression continue et régulière au regard des 4 cycles du socle commun.

Le domaine 3 des cinq piliers qui composent le socle commun, déployé de 3 à 16 ans, consiste en  « la formation de la personne et du citoyen : ce domaine vise un apprentissage de la vie en société, de l’action collective et de la citoyenneté, par une formation morale et civique respectueuse des choix personnels et des responsabilités individuelles. » Source : www.eduscol.education.fr

Un enfant instruit en famille, contrôlé annuellement par l’inspecteur d’académie et dont le parent instructeur ne respecte pas les domaines du socle commun, se voit (re)scolarisé en enseignement public ou privé présentiel, sous quinze jours. 

12 – La France ne doit pas manquer à ses engagements devant l’Assemblée générale des Nations unies. 

Maintenir un tissu d’instruction en famille dynamique permet à l’État français d’éviter d’être épinglé pour le non-respect de la CIDE.

L’article 28 (et 29) de la Convention internationale des droits de l’enfant  prévoit que « les États parties reconnaissent le droit de l’enfant à l’éducation, et en particulier, en vue d’assurer l’exercice de ce droit progressivement et sur la base de l’égalité des chances. » 

Or, quand un enfant est harcelé dans son école (700 000 en France en 2019 selon l’UNICEF), quand son handicap ou sa situation administrative ne lui permettent pas de bénéficier de l’école publique (100 000 d’après de récents articles de Libération), quand ses professeurs, pourtant en demande, ne sont pas formés à appréhender son trouble autistique, sa précocité intellectuelle, son hyperactivité, ses troubles Dys-, ses phobies, son rythme d’apprentissage, la découverte de son genre, l’expression de son orientation sexuelle, son bien-être ou s’il est assigné dans une école qui ne lui garantit pas l’égalité des chances (professeurs absents non remplacés, pénurie d’enseignants remplacés par des personnels sans diplôme, zone rurale ou Zep en déshérence)… l’État français manque à ses obligations face aux traités internationaux.

En plus d’être une soupape pour certains enfants maltraités dans l’école, l’IEF est une béquille utile, que la France serait avisée de prendre en compte, à l’heure où les rapports PISA puis TIMSS ne cessent aussi d’épingler l’Hexagone pour la qualité plus que moyenne de l’exercice du droit à l’éducation.

Les parents, en reprenant à leur charge le service public censé être garanti efficacement par l’État, pallient ses manquements en la matière et en amoindrissent les effets délétères.

Pour toutes ces raisons, nous demandons le retrait de l’article 21 du projet de loi « confortant le respect des principes de la République ».

Cet article de loi apporte une réponse politicienne nulle et non avenue à une crainte sociétale légitime. L’article 21 ne résoudra pas le problème qu’il prétend combattre, mais oppressera des milliers de familles paisibles, jusque-là partie intégrante de la société française.De fait, il accroît le grand écart que fait la France entre les valeurs qu’elle prétend défendre et les textes fondateurs qui définissent la République.
L’État doit rester un soutien aux parents et non tenter de se substituer à eux, en mettant en doute leurs capacités d’éducation et de discernement.
Quand les citoyens concernés par une loi injuste et oppressive se lèvent et se font entendre, un État sage, démocratique, les écoute et inclut leur expertise à sa réflexion.

Ceci afin que les lois restent pour l’avenir citoyennes, équitables et  justes, valeurs essentielles de la République, et que l’intérêt supérieur des enfants, citoyens de demain, soit pris en compte.

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